Dans les pierreries la majesté de la nature se présente pour ainsi dire en abrégé, et, dans l’opinion de bien des gens, elle n’est nulle part plus admirable, et on attache de prix à la variété, aux nuances, à la matière, à la beauté; et, pour certaines pierres, on va jusqu’à regarder comme un sacrilège d’y porter le burin. Il y a tel de ses joyaux qui passe pour inestimable et sans tarif dans les richesses humaines; de sorte qu’aux yeux du grand nombre il suffit de je ne sais quelle pierre pour avoir la contemplation suprême et absolue de la nature.
De toutes les merveilles décrites par Pline l’Ancien dans son Histoire Naturelle, les chapitres sur les pierres précieuses sont parmi les plus exhaustifs et les plus poétiques. S’y mêlent les anecdotes historico-mythologiques, quelques notions sur la géographie des gisements, et des observations techniques où le pertinent côtoie souvent le farfelu: ainsi on apprend dans le même paragraphe que l’ambre serait de l’urine de lynx cristallisée, et qu’elle permet d’observer l’électricité statique (par définition, en quelque sorte).
Ou encore, une curieuse propriété mentionnée à propos de la « lychnis », nom qui aujourd’hui ne fait plus référence qu’à une fleur, mais qui ici désigne vraisemblablement une très belle pierre, la tourmaline: Pline nous dit que, comme l’ambre, elle attire les pailles et les filaments de papier… mais seulement lorsqu’elle est chauffée par le soleil ! Alors, farfelu ou pas ?